Par Sophie Képès le 4 Avr 2015
J’ai vécu un étrange moment de confusion récemment, à la Préfecture de police, alors que je remplissais un formulaire pour faire renouveler une pièce d’identité. On me demandait les dates de naissance de mes parents. Et je n’arrivais pas à me souvenir de celle de mon père. Je me souvenais du lieu, évidemment : Budapest, Hongrie. Et de l’année. Mais ni du mois, ni du jour…
A la place se substituait, impérieuse, une autre date – celle de sa mort. Comme si mon inconscient me signifiait : c’est cette date qui compte maintenant, elle a effacé l’autre.
Pourquoi ce formulaire ne prévoit-il pas une ligne pour la date de sa mort ? me demandais-je, tout en fouillant ma mémoire. Devrais-je l’ajouter spontanément ?
Jusqu’à ce que je me rappelle que cette donnée n’intéresse pas la Préfecture de police. Ce qui l’intéresse, c’est l’élément d’ « extranéité » de mes origines (j’ai appris ce terme il y a longtemps, quand j’ai eu à mon tour la regrettable idée d’épouser un étranger – errare humanum est, perseverare diabolicum).
L’Etat désirait simplement s’assurer pour la enième fois que moi, née en France de deux parents français dont l’un naturalisé avant ma naissance, je suis bel et bien une citoyenne française de plein droit.
Il m’a fallu dix minutes pour retrouver la date de naissance de mon père.